Challenge AZ – B comme Brasserie

Le café de Madrid, brasserie de l’hôtel d’Espagne

Dans son numéro du 28 avril 1866, page 3[1], Le Bonhomme Normand annonce la reprise d’un fonds de commerce caennais : « Voici enfin, qu’un favori de la fortune, M. Canivet, vient d’ouvrir, rue Saint-Jean, en face la rue de Bernières, le grand Café de Madrid. ». L’annonce n’explicite pas s’il est propriétaire ou simple gérant.carte postale début 20e

Comme on peut le voir sur cette carte postale du début du vingtième siècle, le Café de Madrid, à l’extrême gauche, est la brasserie de l’Hôtel d’Espagne. Il jouxte son principal concurrent, l’Hôtel d’Angleterre. La demeure est une vieille dame caennaise. Voici la description qui en est faite en 1860 : «  Rue St-Jean n° 73, Maison de l’Hôtel d’Espagne – Cette maison a été presque complètement restaurée. Le toit pyramidal existe encore ainsi que les lucarnes, sur une desquelles on lit la date 1593. » [2]

Sur le net, on peut retrouver quelques jalons de la vie du commerce, jusqu’à la destruction de l’immeuble. En 1888,  l’Hôtel est proposé à la location.[3] A priori, cette date marque la fin de l’exploitation du fonds par les CANIVET, qui en restent propriétaires. En 1912, l’Hôtel et la Brasserie sont exploités par un dénommé CHABERT[4]

Dans la nuit du 6 au 7 juin 1944, les bombes anglaises détruisent l’hôtel… d’Angleterre et celui d’Espagne. L’hôtel d’Angleterre est d’ailleurs peut-être un objectif puisqu’il avait été réquisitionné pour en faire le foyer des soldats allemands. Les décombres des deux voisins et concurrents obstruent totalement la rue. Leur incendie se propage jusqu’au monastère de la Charité, quai Vendeuvre. La bataille de Caen débute à peine. La rive gauche, au bout de la rue Saint-Jean, de l’autre côté du pont, ne sera aux mains des Alliés que le 9 juillet. Il faudra encore attendre dix jours de plus pour que la rive droite, celle de la rue Saint-Jean, le soit. Des bombardements, allemands cette fois-ci, frapperont encore la ville jusqu’en août … Pour ceux qui voudraient en savoir davantage sur la libération de Caen, et se rappeler des conséquences concrètes d’une guerre, je ne peux que conseiller l’excellent site http://sgmcaen.free.fr/ (ou la visite du Mémorial). On y retrouve notamment cette vue finale, indissociable, des hôtels d’Espagne et d’Angleterre. Caen 1944-45_ coll privée Y. LecouturierRemarquez le magasin DEVRED, enseigne de vêtements masculins bien connue qui, contrairement aux deux précédents, a pu renaître de ces ruines et est toujours exploité au même endroit aujourd’hui, au carrefour de la rue Saint-Jean et de la rue de Bernières.[5]

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Auteur : C. Canivet (Lignée 026)

 

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[1]Le Bonhomme Normand 28/04/1866 p3

[2]Caen: son histoire, ses monuments, son commerce & ses environs : guide du … Par François-Guillaume Stanislas Trebutien 1860

[3]Le Bonhomme Normand 06/07/1888

[4]Courrier à l’en-tête due l’Hôtel d’Espagne du 15/04/1912

[5]http://sgmcaen.free.fr/bombcomplet.htm

One Response to Challenge AZ – B comme Brasserie
  1. Christophe CANIVET 20/06/2014 à 07:01

    J’ai depuis retrouvé un autre article, un peu plus ancien, qui annonçait le projet.
    Le Grand Café de Madrid est peut-être moins lié à l’hôtel d’Espagne que je ne l’ai cru dans un premier temps. La bâtisse et l’activité hôtelière étaient anciennes mais la brasserie est peut-être une création de ce CANIVET.

    Dans son numéro du 19 novembre 1865, page 1, Le Bonhomme Normand fait part d’une rumeur commerciale : « Les cafés rivalisent de zèle et de becs de gaz pour séduire et abreuver les consommateurs. (…) M. Canivet va, dit-on, installer rue Saint-Jean, dans l’ancienne habitation de Monsieur le Colonel Guépratte, un café aux mille colonnes. ».

    A noter que c’est un article sur la première page du premier numéro de ce journal. Le chroniqueur n’est pas allé chercher ses informations bien loin puisque le siège du journal était situé à la Librairie Alliot au 26 de cette même rue Saint-Jean. Le Bonhomme Normand deviendra rapidement le premier hebdomadaire de province avec 30 à 40000 exemplaires diffusés dans le Calvados. Son successeur direct (comme nombre d’autres titres, le Bonhomme Normand a été interdit de parution à la Libération), Liberté-Le Bonhomme Libre, est toujours diffusé de nos jours.

    Le lieutenant-colonel Guépratte, précédent occupant des lieux, commandant du dépôt de remonte de Caen, avait été nommé au commandement de la première circonscription (Normandie) des dépôts de remonte de France (voir Moniteur des armées du 06/03/1862). Autrement dit, il était chargé de l’approvisionnement en montures pour la cavalerie, fonction qui cumule alors le prestige en soi-même de la cavalerie et le fait que la région était la première pourvoyeuse de chevaux pour le jeune empire, prestige de la fonction qui devait influer sur la qualité de son logement.

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