Dans l’entre-Sambre-et-Meuse, région belge à cheval sur les provinces du Hainaut et de Namur, comme partout dans le nouveau pays de Belgique, les premières années de l’indépendance (1830) furent marquées par une hausse du prix des céréales. 1845 fut particulièrement difficile : la culture de la pomme de terre est aussi atteinte comme presque partout en Europe par un mal inconnu : le mildiou. Et l’hiver qui suit est rigoureux. L’année suivante, les récoltes furent aussi désastreuses et la demande se mit à dépasser l’offre. Les fermiers virent dans cette situation critique l’opportunité de compenser leurs pertes voire d’augmenter leurs bénéfices en réclamant aux villageois un prix exorbitant qu’ils n’étaient, pour la plupart, pas en mesure de payer. Le pain de 2 kilos leur revenait à 1,25 francs, alors qu’un mineur adulte ne gagnait à l’époque que de 1,80 à 2,25 francs pour une journée de 12 heures de dur labeur(1).
La famine aidant, la révolte grondait dans la population.
Le 8 mars 1847, un groupe de villageois parti de Gozée, traversa les villages de Marbais, Marbiseul, Ham-sur-Heure, Cour-sur-Heure, Berzée, Rognée, Mertenne, Clermont pour finalement atteindre Strée. Les ouvriers en colère passaient de ferme en ferme et exigeaient du cultivateur de leur vendre son froment au prix de 7 francs le vasseau. Si le fermier était conciliant, on remplissait les sacs et l’exploitant était payé sans discussion. Par contre s’il refusait à se plier à leurs exigences, le froment était emporté de force, mais en plus, la maison était visitée et on emportait toute la nourriture disponible et les tonneaux de bière étaient mis en perce. Après chaque visite, ils allaient cacher les provisions dans les campagnes afin de pouvoir les récupérer le soir tombé.
Par contre, si en cours de route, la troupe trouvait porte close, les hommes forçaient le passage et les quelques fois où les fermiers tentèrent de les intimider armés de fusils, ces derniers battirent bien vite en retraite devant l’attitude déterminée de leurs assaillants (2).
Au lendemain de la collecte forcée de vivres, la gendarmerie de Walcourt et des soldats casernés à Philippeville furent réquisitionnés pour rétablir l’ordre dans la région. Lorsque les militaires entrèrent dans Thy-le-Château, on sonna le tocsin et la chasse aux pillards fut lancée. Malgré la complicité des villageois, après un mois, les révoltés identifiés étaient finalement tous arrêtés et incarcérés.
Il y avait parmi eux sept Canivet de la lignée 182, originaires de Berzée : les 3 frères Norbert 27 ans, Alexis 25 ans et Eloi dit Moucheron âgé d’à peine 21 ans sont de la partie mais ils n’ont pas entraîné Benjamin, âgé de 19 ans. Leur père, Auguste, soldat dans l’armée napoléonienne avant son mariage et alors garde-champêtre, est inculpé également. On y trouve également une femme, Emilie « vénérande » Canivet dite vénérande Jean Lallemand. Nous avons bien une Emilie « Emerante » née en 1820 à Berzée mais qui n’est pas liée, au stade actuel des recherches, à la lignée 182. Une visite aux toutes nouvelles archives de Namur s’impose pour éclaircir l’identité des autres inculpés…
(1) d’après le blog « Les lignes de l’entre Sambre et Meuse » (auteur Bob)
(2)Le journal namurois « L’Ami de l’Ordre » (1839-1918) a rapporté les faits dans son édition du 15 mars 1847. Archives de l’Etat, Namur.
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